J'ai effectué les 6 et 7 septembre dernier un stage à Metz de maniabilité énergétique ("pilotage à la japonaise")
Voici le lien des stages sur le site du formateur, Clément, moniteur d'auto école à Metz: http://antipilotedelignedroite.fr/fr/de ... japonaise/
Tout d'abord, il faut savoir que j'y étais allé pour faire du gymkhana, et au final, je suis revenu avec des compétences qui vont au delà du gymkhana. Pour Clément, le gymkhana n'est pas le but mais la conséquence de l'apprentissage qu'il va nous prodiguer sur ces 2 jours.
Sa philosophie, c'est avant tout de bien comprendre les principes qui régissent la stabilité de la moto, c'est pourquoi il y a la "longue" partie théorique (toute la première matinée). A ce propos, je vous mets un lien vers un talk Ted d'un chercheur de l'université de Delft: https://www.youtube.com/watch?v=2Y4mbT3ozcA
Clément a abordé avec nous les résultats de leur recherche, et pour résumer, ils ont découvert que contrairement à ce qu'on pensait, ce n'est pas la force gyroscopique qui maintient en équilibre un 2 roues mais la chasse (castor en anglais). Dans la vidéo, ils font l'expérience de lancer un vélo et ils voient que le vélo se redresse à chaque fois grâce à la chasse de la roue avant. Nous allons effectuer l'après-midi la même expérience avec la moto, j'y reviendrai.
Durant toute cette partie technique, on apprend comment est constituée une moto et comment chaque détail ne relève pas du hasard (empattement, angle de chasse, le guidon, la selle, la puissance, le couple, le poids, etc ...).
Fin de cette matinée vers 11h, le temps d'aller sur le parking du Kinepolis où aura lieu la pratique, véritable coeur de ce stage. Le temps de récupérer les motos, de les emmener et de manger un morceau, on est opérationnel vers midi et demi pour les choses sérieuses
Tout au long du stage, Clément va insister sur un point fondammental pour lui: il faut se concentrer sur la technique et non sur la finalité. Selon lui, la finalité nous amèhe à au "plus court chemin", et ce n'est pas toujours le bon, ou devrais je dire le meilleur. Pour prendre un exemple concret, il nous rappelle l'examen du plateau lent. La finalité, c'est de faire le parcours en plus de 20s. La technique, ce sont les trajectoires de sécurité. Se concentrer sur le chrono uniquement, ça laisse ouvert la porte à toutes les fenêtres
Pour revenir au stage, il nous explique que tant que chaque technique n'a pas été acquise, ça ne sert à rien d'avancer. Il est évident qu'on ne maîtrisera pas une technique en l'espace de 2 jours. C'est pourquoi on doit s'appliquer à la comprendre, la ressentir. Afin de pouvoir la travailler à notre retour, dans l'esprit de la technique recherchée, et non de la finalité.
Voici le programme de cette première après-midi: la position de pilotage, la moto ne tombe bas et l'arrêt.
La position: la base pour un pilotage efficace. Le but est de faire un avec notre bécane. On prend appui non pas sur la pointe mais la zone juste après (la racine des doigts de pied), les pieds sont entièrement plaqués sur le cale-pied, à savoir toute la face interne, il ne faut pas laisser d'espace entre le pied et la moto. Ensuite on ne vient pas coller le réservoir (j'entends venir plaquer l'entrejambe au réservoir). Il faut trouver la bonne distance afin que l'on puisse prendre en tenaille le réservoir avec les cuisses. Ni trop loin (parce que là on n'a plus que les genoux) et ni trop près (parce que là on n'a plus de bras de levier).
Si on a bien fait jusque là, on ne doit pas pouvoir accéder au guidon si on se tient droit. Il faut donc pencher légèrement, en gainant le tronc, et arriver au guidon dans la position que Clément nomme 'le vélociraptor'. Les bras sont fléchis (du poids dans les coudes). On doit venir se poser sur le guidon, le plus léger possible. On le verra dans l'exercice d'après, il faut tendre vers le minimun de contrainte sur le guidon. Enfin, le port de la tête: on sort la tête hors de l'eau, pour reprendre l'image de Clément. On a l'air un peu con à vrai dire, mais on verra par la suite qu'il n'y a aucun détail à négliger.
Clément nous explique que cette position, elle doit devenir notre standard, ou autrement dit, arriver à ne plus réfléchir et l'adopter quelle que soit notre allure (pour ma part, aujourd'hui, elle me parait plus facile à allure soutenue qu'à allure lente, où j'ai l'ancien automatisme de vouloir coller mon entrejambe au réservoir et avoir une position plus droite).
La moto ne tombe pas: on rentre dans le vif du sujet. On va reproduire l'expérience du vélo, mais en moto. On va la laisser rouler au ralenti en 2 sur les CB500 (soit à peu près dans les 12 km/h) et à chaque fois qu'elle va aller d'un côté, on va donner un coup sec sur le guidon dans la même direction que la roue. Et là, exactement comme avec le vélo (cf la vidéo à 2"20), la moto se relève ! Une fois qu'on comprend ça, on peut s'amuser à laisser la moto s'incliner de plus en plus, on sait qu'elle va se relever grâce à l'action sur le guidon. On répète cet exercice, et plus on y passe du temps, plus on lâche prise et laisse la moto s'incliner. Car on touche ici la plus grande barrière: nous ! Notre peur de tomber nous bloque, elle nous laisse pas la moto s'exprimer. Et une moto, ça s'incline, ça fait partie de son fonctionnement et c'est tout à fait normal.
Pour comprendre comment la moto tombe, on passe à un second exercice.
On prend position, on est toujours en 2 au ralenti, et là, l'exercice consiste à très progressivement transiter notre poids d'un côté. Donc si on prend le côté droit, il s'agit de d'aller dans la fesse droite, la jambe gauche pousse dans le réservoir, notre corps opère progressivement une vrille, le buste est gainé, le regard à l'horizon, la tête droite hors de l'eau (parallèle au sol). La moto va tourner, et si on n'exerce pas de contrainte sur le guidon, la fourche prend de plus en plus d'angle jusqu'à atteindre la butée. Et c'est à ce moment que la moto tombe (et donc on pose le pied au sol). La moto tourne, elle se visse au sol, ce n'est pas immédiat. Tant qu'elle n'atteint pas la butée, elle continue de tourner. C'est donc le fait de ne plus avoir la liberté de tourner sur son axe (arrivé en butée) qui fait tomber la moto.
Ca peut paraître anodin et facile comme exercice mais dans la pratique, on on ne tombe pas facilement. Clément nous dit que c'est parce qu'on ne suit pas les consignes. Il a raison, mais ce n'est pas parce qu'on est des ânes batés. Il y a un conditionnement en nous, et plus on a de l'expérience en moto, plus cet exercice est compliqué. Donc non, on ne respecte pas les consignes, mais c'est pas volontaire. Il faut s'armer de patience, essayer de faire le vide dans sa tête afin d'appliquer les consignes à la lettre, sans parasite. On va beaucoup tourner avant d'y arriver
Au passage, on comprend mieux le port de la tête (parallèle au sol et fixant l'horizon): si on regarde devant soi en inclinant la tête, on finit par vite avoir le tourni.
L'arrêt: ou comment réaliser qu'on n'a rien retenu de l'enseignement du plateau lent ! Il faut tout d'abord distinguer deux choses: freiner et s'arrêter. Freiner, à savoir passer d'une allure rapide (> 20 km/h) à une allure lente (10-20 km/h), c'est le job du frein avant. S'arrêter, à savoir passer d'une allure lente (10-20 km/h à 0) à l'immobilité de la moto, c'est le job du frein arrière. Il ne faut pas utiliser le frein avant pour s'arrêter, c'est le mal ! Attention, on exclut le cas particuliers du freinage d'urgence.
Il faut appuyer sur la pédale très fort au début, ceci a pour effet d'enfoncer la fourche, et progressivement relever la pression jusqu'à l'arrêt, moment où on ne doit plus avoir d'action sur la pédale puisque la moto est immobile. Il ne faut pas tendre les bras, car ceci a un effet sur la fourche, et donc sur la roue avant. Au contraire, il faut garder le contact au guidon le plus léger possible, et pour cela, il faut serrer les jambes très fort. C'est la technique enseignée dans le plateau lent, lorsqu'il faut s'arrêter entre les 3 lignes avant de repartir d'un côté.
Clément ne nous enseignera pas plus aujourd'hui. Ca va bientôt faire 6 heures qu'on pratique au soleil, on est bien rincés, et la tête bien pleine. La suite pour le lendemain, rendez-vous sur le même parking à 8h pour une journée qui sera encore plus chargée.
Je réalise que j'ai pondu un joli pavé, je vais m'arrêter là pour le moment et reviendrai partager la deuxième journée plus tard.
A suivre ...