http://www.lepoint.fr/auto-addict/secur ... tor=CS1-31Entré dans les moeurs depuis une trentaine d'années, le dépistage du taux d'alcoolémie des conducteurs sera enfin doublé bientôt par un dépistage au cannabis. Une drogue en usage, hélas, très répandu désormais, et dont les effets affectent notablement la perception de la route par celui qui en a consommé. Bénéficiant depuis trop longtemps d'un laxisme des pouvoirs publics alors que les moyens de dépistage existent, tout devrait changer dans les prochaines semaines. Le délégué interministériel à la sécurité routière Jean-Robert Lopez a en effet promis l'équipement des forces de l'ordre en nouveaux tests salivaires.
Plus pratique que les tests urinaires déjà commercialisés par de nombreux buralistes depuis le début de l'année, ce test sera mis à l'épreuve et, pour éviter toute contestation, la procédure prévoit un deuxième test prélevé afin d'être analysé en laboratoire.
M. Lopez a indiqué qu'"à partir de cet automne on va expérimenter dans plusieurs départements ce qu'on appelle le deuxième test salivaire. Au lieu d'aller en milieu hospitalier pour une analyse sanguine, les forces de l'ordre feront un deuxième prélèvement salivaire. Il sera envoyé dans un laboratoire pour confirmer d'une façon incontestable la prise d'une substance illicite."
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Ce test qui se présente sous la forme d'un petit bâtonnet "devrait nous permettre de pratiquer davantage de dépistages sur le bord de la route", précise M. Lopez, en rappelant que dans 4 % des cas d'accidents, l'usage de stupéfiants est le facteur principal.
Risques multipliés par 2 ou... 14
En février, une opération de contrôle similaire, avec des tests salivaires, avait déjà eu lieu en Polynésie française, à Papeete. Avec des résultats sur la méthodologie apparemment satisfaisants. Sur le territoire national, seulement 114 000 contrôles ont été réalisés en 2013 et un sur trois était positif. Un taux apparemment très élevé, mais qui s'explique parce qu'il a été pratiqué à la suite d'un comportement anormal du conducteur. " Mais on ne les fait pas d'une façon aléatoire comme pour l'alcool ", déplore Jean-Robert Lopez. Ce frein s'explique par le fait qu'il s'agissait jusque là de tests sanguins qui doivent être réalisés en milieu hospitalier.
Selon une étude assez ancienne "Stupéfiants et accidents mortels de la circulation routière" (SAM) commanditée par le ministère de la Santé...en 2003, "conduire sous l'effet du cannabis double, en moyenne, le risque d'être responsable d'un accident mortel (x 1,8). L'étude démontre pour la première fois l'existence d'un "effet-dose", c'est-à-dire que le risque augmente avec la concentration de THC (principe actif du cannabis) dans le sang.
Et on peut penser que depuis une dizaine d'années, la situation n'a fait que se dégrader avec l'usage de plus en plus fréquent, voire banalisé de cannabis. Pire, la situation la plus fréquente qui consiste à cumuler les consommations de cannabis et d'alcool (c'est le cas de 40% des conducteurs positifs au cannabis) démultiplie les effets comme une véritable bombe à retardement. Le conducteur positif à l'addition cannabis et alcool multiplie ainsi par... 14 le risque d'être responsable d'un accident mortel.
Prévention à défaut de sevrage
Depuis le mois de février dernier, des tests permettant l'autodépistage du cannabis sont en vente ( à partir de 3,50 €) dans 3 000 bureaux de tabac. Marc Elie, le gérant de la société Elicole, qui fabrique ces tests estime qu'il s'adresse avant tout aux fumeurs occasionnels, afin de leur permettre de savoir s'ils sont toujours sous l'influence de la THC, la substance psychotrope du cannabis dont l'élimination de l'organisme peut prendre plusieurs jours.
"Le cannabis est illégal et peut être dangereux pour certaines personnes. Mais il y a, selon les chiffres officiels, plus de 4,5 millions de fumeurs occasionnels en France, il faut en tenir compte", explique Marc Elie, dont la société est spécialisée dans la prévention des addictions en milieu professionnel. Il s'agit de tests urinaires, différents des tests salivaires de dépistage utilisés par les forces de l'ordre.
Ironie de la situation, ces tests sont fabriqués par ceux-là mêmes qui ont consommé du cannabis. "Cela nous permet également de donner du travail à une centaine de détenus de la maison d'arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault), qui sont bien souvent là à cause du cannabis justement", précise M. Elie.
Selon la Sécurité routière, les conducteurs positifs au cannabis représentent 13,4 % des accidents mortels. En cas de contrôle, un automobiliste présentant des traces de THC est passible de 4 500 euros d'amende, d'un retrait de six points sur le permis et de deux ans d'emprisonnement.