désolé je n'ai pas de photo de la mienneEn 1990 ou 91, j’avais donc 20/21 ans. Un pote du boulot, plus âgé que moi, arriva un jour avec une CB 1100 R de 1982. Lorsque je la vit ce fut le coup de foudre. Je n’avais jamais rien vu de pareil. Elle imposait le respect par sa taille et la puissance qui s’en dégageait. Et j’ai craqué définitivement sur ses formes et ses couleurs.
J’allais alors m’acheter un 1100 GSXR, mais j’ai abandonné et harcelait mon pote pour qu’il me la vende, après de multiple refus « hey gamin c’est de la moto d’homme ça, il faut des bras plus gros que tes cuisses pour la tenir ». C’était un motard comme j’en ai plus vu depuis des années, encore plus fêlé que dans le Joe Bar Team. En bécane il n’avait qu’une règle : à fond. Le genre de type qui avait piloté un 750 H2 a 15 ans. Pour situer un peu je l’ai vu, alors que je le suivais, débouler a peut-être 120/140 km/h en K 100 sur le Bvd de Sébastopol, doubler une voiture par la droite qui fit un écart pour tourner, elle le percute, il part en biais et percute un camion en stationnement ce qui le remit droit. Il s’arrête à côté de moi et me dit d’une voix calme. « T’a vu ? Faut toujours rester vigilant il y a des gens qui ne font pas attention quand ils conduisent ».
Quelques semaines plus tard il me donna la CB 1100 R devant mon insistance.
J’ai entassé la moto et les quelques 10 mètres cube de pièces qu’il me donna avec (on a rempli un Renault Traffic rehaussé) dans un garage. Et entreprit de la reconstruire. Car en fait elle était complètement rincée et tournait sur 3 pattes. Pour ne rien arranger elle avait couru. Je la démontai entièrement.
Même si j’avais fait pas mal de moto auparavant c’est avec elle que je fis mon apprentissage de la vie de motard.
Et déjà en rencontrant des personnages du monde de la moto en recherchant des pièces difficile a trouver ou de l’aide de spécialiste de ce modèle pour la mécanique. Les mécanos des garages conventionnels refusaient d’y toucher. Il me fallut trouver des gars plus « pointus » qui avaient la pièce rare, le conseil qu’on ne trouve pas dans les manuels de mécanique, le coup de clé de 12 magique….
La plupart du temps ils étaient 2 fois plus vieux que moi et d’un air amusé me disaient « toi a ton âge tu a un 11R de ’82 ? « Faut dire que c’était un compé-client (SC08), une machine produite pour les courses de production a 1500 exemplaires et en comptant mon stock de pièce j’en avais presque 3 à moi tout seul. Je pense à ce monsieur qui a son garage a Ourville en Caux « le spécialiste » de la CB1100R.
Ou cette casse moto qui a fermée il y a des années avenue Parmentier dans le 11ème. Auprès de qui je trouve 2 fourreaux de fourche neuf dans leurs emballage de papier gras (les miens étaient tellement usés que les tube de fourche battaient dedans). « Ça vaut 6000 frs je te les fais a 3000 » devant mon air dépité il comprit que je n’avais pas les moyens « bon tu as combien sur toi ? » moi je lui dis « 500 » et lui « bon ben donne ça feras le compte ».
Le moteur fut refait a Etrepagny par un mécano spécialiste des machines « typées », On l’a remonté comme elle était dans sa prime jeunesse, culasse « tapée », pistons forgés Wiseco haute compression qui la passait de 1069 à 1123cc, etc.. Le pot piste avait été fait sur-mesure, vide, il lâchait des flammes longues comme l’avant-bras.
La peinture avait été faite par un artiste, les teintes et notamment le blanc nacré pailleté, la déco, les emblèmes tout était comme à l’origine. Sauf que, là les connaisseurs s’en rendaient compte, elle était mieux faite qu’en sortant d’usine, lisse comme un miroir, pas le moindre défaut.
Les amortos Fournalès entièrement refais et réglés pour la machine peaufinaient la touche racing avantageusement, avec les demis guidons Tommaselli , l’amortisseur de direction, le rigidificateur de fourche, les stickers « HRC » « Castrol » etc..
Pour les pneus ce fut difficile, elle datait d’une époque où les sportives avaient des pneus arrière de 110/120 et les motos de course des 130… et là on était arrivé en des temps ou les pneus pour sportive était au mini en 160 mais souvent 180. Je n’ai trouvé a ma taille que des gommes d’une monte pour 600 Diversion. Ce n’est pas ce qu’on appelle une sportive. Un pote qui avait fait de la piste tentant de me rassurer « t’inquiète, les pneus que tu as il y a 15 ans on ne les avait pas sur circuit »
Puis, après plus d’un an vint le temps de la mettre en route. Le Bestiau c’est éveillé fort et puissant les murs du garage en tremblaient. La moindre sollicitation de la poignée provoquait un son rauque et l’aiguille du compte tour s’affolait. Impatient la première sortie se fit avec juste le réservoir posé sur le cadre, sans carénage ni selle ni phare, rien. Un petit tour dans Clichy pour vérifier que tout fonctionne. Je découvris alors ce moteur hyper musclé et coupleux souple et puissant qui balance les watts dès qu’on dépasse le ralenti.
Le vendredi d’après elle était entièrement habillée pour sa première sortie de gala, sans clignotant qu’elle ne porta jamais. Ancienne pistarde les fixations et le commodo avaient disparus.
Elle ne passait pas inaperçue avec ses couleurs et le son caverneux du pot piste. Une machine très longue ce qui aidait à faire passer la puissance au sol (ainsi que son poids de + de 240 kg) et lui donne une excellente stabilité en contrepartie d’un pilotage musclé pour les changements d’angle. Une position de conduite digne des meilleur GT sport de nos jours, impeccable pour manger du kilomètre. Un carénage et une bulle qui couvre très bien le pilote. Rapidement très en confiance, je me rendais à Bastille rejoindre des potes, impressionné par comment la moindre sollicitation de la poignée de gaz propulsait la moto.
La bas elle fit son effet, mes potes se grattaient la tête en cherchant ce que pouvait être cette machine peu connue. Comme elle avait l’air flambant neuve on pensait a un nouveau modèle pas à un truc qui avait 10 ans. Le pneu arrière de 130 faisait sourire.
Première balade ce soir-là on est parti du côté de chez Mickey qui venait d’ouvrir son parc. J’étais aux anges. Assurément une machine a bonheur. De retour vers Paris sur le A4 premier fait d’arme de ma 11R. Je me trainais a 110, en rodage et un pote avec son 900 CBR Fireblade« Full », la sportive la plus récente du moment, roulait à mes coté pour ne pas que je sois seul alors que les autres 1100 GSXR, FZR et consorts s’amusaient gaz en grand. Mais pour lui c’était un peu frustrant et il me titillait pour que j’ouvre un peu. Je résistais tant bien que mal regardant mon totalisateur kilométrique qui n’affichait même pas 100 km. Mais bon à 20 ans on ne tient pas longtemps dans ce genre de tentation. Posé sur le dernier rapport je lui fais un décompte avec les doigts de la main gauche, a zéro on ouvre en grand. La 11R part comme un boulet de canon, je parviens à grand peine à remettre ma main gauche sur la poignée. Je comprends ensuite pourquoi il y avait un dosseret lorsque je ne peux m’empêcher de glisser en arrière, ça tire très fort sur les bras. J’avais déjà conduit des grosses bébêtes mais c’est la première fois que j’avais l’impression que j’allais décoller d’un porte avion. Arriver à 240 km/h, dernier chiffre du compteur, après il y a juste une graduation pour indiquer le 250, je réduis un peu pour soulager le moteur et mes deltoïdes par la même occasion, il se passe bien 3 secondes ou je me sens bien seul avant qu’une boule bleu et blanche me déboite pleine bille et me laisse sur place. C’était mon pote que je ne reverrais que le lendemain pour qu'il me dise :
« T’a mis quoi dans ton machin ?, quand on est partit j’en ai rentrée 3 et j’ai jamais réussi à te recoller ! »
Ce jour la commença mon amour pour les motos avec un énorme coffre moteur capable de repartir sur le dernier rapport. La CB 1100 R était donner pour a peu près 130 CV + ou – 5 cv d’origine (elle datait d’avant la limitation de puissance), la mienne n’était pas d’origine. Pas une moto de pointe de vitesse mais un bon dragster. En départ arrêté en général j’étais déjà en 5 quand mes potes étaient en 3ème. Faut dire qu'il y avait de la compote, le pauvre démarreur avait souvent bien de la peine a passer la compression et devait repartir en arrière la roue libre de démarreur se cassait alors les dents dans des claquements qui vous faisait rentrer la tête dans les épaules de douleur pour elle. Et sa tenue de route en courbe surprendra souvent malgré mes pneus de 600 Diversion.
Avec elle je me ferais des sorties inoubliables sur les route du Vexin et de la Normandie, les pieds de ma copine passant au-dessus de mes bras chaque fois que j’ouvrais un peu sec les gaz. Avec son châssis rigide et ses suspensions a faible débattement elle feras de nombreux décollage/atterrissage sur les route du Pays de Caux, fallait faire gaffe une fois en l'air pas de rupteur d'allumage la dessus, si tu allais en surrégime c’était salade de soupape directe . Et de grand voyages sur voies rapides ou son confort, sa tenue de cap et sa protection permettaient de « cruiser » a 200 sans peine. Bon jamais très longtemps a près de 15 litres/100 km, les 26 litres du réservoir défilaient assez vite.
Pour être totalement heureux il me manquait un truc que je mit un an a mettre au point. J’avais la moitié du kit frein racing d’époque Brembo. Les disques, les durites blindées, les supports de pinces flottants spéciaux en alu taillées dans la masse, je finis par trouver les étriers P08 série or et obtenir de l’importateur Brembo un maitre-cylindre qui entre temps était passé collector, il n’en restait plus que 3. L’essai se fit sur le A15, en voulant passer entre 2 voitures, alors qu’on était à peine a 200, il y eu un écart, prise de frein, la moto c’est de suite mise debout, ma copine s’est retrouvée sur mes épaules et s’est rattrapée au bloc compteur, devant le réservoir je voyais le cadre onduler mollement de gauche à droite autour de la colonne de direction. Quand on s’est posé on était à 40 km/h. maintenant elle freinait comme elle accélérait.
Je cassais mon premier moteur un peu plus tard, sur la route de Vierzon. Après 140 km au taquet, j’entendis un cliquetis qui ne présageait rien de bon, dans la seconde nécessaire à prendre l’embrayage et appuyer sur le coupe circuit, une bielle passait au travers du carter moteur. Ma copine fut recouverte de Castrol RS.
S’en suivit un essai avec le moteur refait avec des pistons d’origines, je n’ai pas pu m’y faire, juste après le rodage il fut déposé pour être remis dans l’ancienne configuration avec les Wiséco.
Ce qui me valut mon second (et dernier) retrait de permis (le 1er ce fut la même semaine ou j’ai eu le papier rose avec un XT600). Un vendredi soir sur le périph’, la police avait fait un piège à moto, tout bloqué impossible d'en échapper. A cette époque le tarif n’était pas en euro , j’avais pris 6 semaines ( ce que je trouvais hard) que je devais certainement moins à la vitesse qu’a mon insolence devant la commission de retrait de permis n’ayant pu m’empêcher de répondre à la question « Pourquoi rouliez-vous à 218 km/h ? » par « Parce que je ne pouvait pas aller plus vite, la moto qui était devant moi n’avançait pas et je n’avais pas la place de la dépasser »
Je fis une petite glisse dans paris en conduisant comme un kéké entre les voiture la moto fut vite remise sur pied, l’expert en assurance surévaluant largement la moto en vue de son côté « collector » et de son état proche du neuf, merci a lui.
Quelques années après ce moteur me lâchât dans une bourre mémorable avec une bande de furieux en revenant de Dreux. Ça devait être en 1998/99 car il y avait des YZF 1000 Thunderace dans le lot.
La moto est sortie comme un missile d’une courbe vers Rocquencourt puis s’est mise a avoir des coupures de régime et passait de 3000 a 8000 t/min, sachant que ça casserais et ne voulant pas rentrer à pied je suis resté à fond jusque chez moi ou le moteur rendit l’âme, piston cassé, devant mon garage. Brave bête qui m’a ramenée à bon port.
Je me lançais alors dans la mise au point d’un nouveau moteur encore plus pointu, toujours en Wiseco mais avec une préparation des bielles courtes et vilebrequin de chez Moriwaki . Une culasse trouvée neuve que je fis préparer. Une rampe de carbu top moumoutte. Cela fut très long, entre temps je m’étais acheté un modèle de ’83 qui avait quelques amélioration sur la miennes et des couleurs légèrement différentes, toujours blanc nacré mais le rouge et le bleu était métallisés. Entièrement d’origine jusque la trousse a outil, première main 100 000 km et tournait comme une neuve. En lot avec une VF 1000 R du même acabit, la VF 1000 R fut la compé client qui suivit la CB juste avant que cela passe au RC 30 puis RC 45 etc…
Je n’essaierai jamais le nouveau moteur, vers le début des années 2000 je rendis la main sur les motos de collections « mes danseuses » capricieuses et dépensière comme des divas. Et dus me séparer d’elle avec un 1000 CBX 6 cylindres et d’autres.
Dans la catégorie « ça envoi grave » j’ai jamais retrouvé les mêmes sensations, ce qui s’en approchât le plus ce fut un 1100 GSXR de ’89 que mon mécano d’Etrepagny gonfla avec un kit en 1250 et une rampe de carbus énormes. Et un 1100 ZZR, que j’ai acheté a un copain, dont la moitié du moteur ne venait pas de chez Kawa ‘.
http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=v53I-14rtKg
Avant c'était mieux, déjà il n'y avait pas internet donc pas de forum et il fallait aller au bistrot pour entendre des conneries