Objet :
Contre la baisse de la vitesse à 80km/h sur les départementales !Madame, Monsieur le député,
Vous n’êtes pas sans savoir que le 9 janvier 2018 a été l’occasion pour le comité interministériel à la sécurité routière et le premier ministre d’annoncer tout un tas de mesures, et notamment la
réduction de la vitesse sur les routes départementales, sans séparation centrale, de 90 à 80km/h.
Sans doute aurez vous noter que cette mesure est
fortement impopulaire, différents sondages réalisés par quelques organes de presse annonçant souvent plus de 70% d’avis contre
(1), et le 1er ministre ne s’en cache pas, annonçant qu’il est prêt à être impopulaire si cela contribuer à sauver des vies, mesure que d’après lui, devrait en effet épargner près de 10% des morts sur la route.
Seulement, ce chiffre s’appuie sur le
dogme de Nilsson et Elvik (
-1km/h = -4% de morts), une étude publiée en 1981 et basée sur des statistiques de mortalité routière suédoise de la fin des années 60, pour statuer du changement de coté de circulation, la Suède étant passé de la conduite à gauche à la conduite à droite, le 3 septembre 1967. Cette étude, que certains tentent encore à vouloir exploiter aujourd’hui pour justifier de l’effet d’une baisse de la vitesse autorisée, exclue pourtant tous les effets sur la mortalité routière, que peuvent avoir la sécurité active et passive des véhicules (
qui a largement progressé depuis), l’état de nos infrastructures routières (
qui a progressé mais régresse depuis peu avec les coupes dans les budgets d’entretien des routes), la congestion du trafic, ou l’arrivée depuis du téléphone portables (qui a permis de prévenir les secours bien plus vite), les progrès de la médecine, etc... Cette étude ne peut qu’être inapplicable aujourd’hui, puisque ignorant la plupart des effets influant sur la mortalité routière, et pourtant, elle est bien la justification à cette mesure
(2).
Seuls 8 pays sur les 17 de l’Europe ont une limitation de vitesse aussi contraignante, la Suisse, les Pays Bas, les pays nordiques (
et leurs conditions météorologiques et lumineuses difficilement comparables à la France). Le
Danemark a lui tenté une telle limitation, et devant l’échec de la mesure, a finalement fait marche arrière en revenant à 90km/h, ne constatant aucune hausse de l’accidentologie.
(3) On pourrait aussi parler, plus proche de chez nous, du
périphérique parisien, passé de 80 à 70km/h : cela à conduit à une hausse de le vitesse moyenne, du fait d'une diminution de l'effet accordéon, et une baisse significative du nombre d'accidents, démontrant justement bien aussi que le dogme de Nilsson qui lierait vitesse et accidentologie est faux. En revanche, ça c’est aussi accompagné d’une
hausse du nombre de morts ; 4 en 2013, contre 7 en 2014, dont personne ne parle évidemment. Les automobilistes franciliens retenant eux surtout une multiplication par 2 des contraventions pour excès de vitesse, à iso nombre de radars considérés.
(4)Vous me direz peut-être que la mesure a été testée en France pendant 2 ans, sur 3 portions de nationales
(17 km de la RN7 dans la Drôme, 55 km de la RN151 entre la Nièvre et l’Yonne, et 13 km de la RN57 en Haute-Saône), étude à propos de laquelle, le CISR refuse de communiquer en termes d’accidentologie. Des calculs, réalisés par des sources indépendantes du dossier, se basant sur les chiffres mis à disposition sur le site du ministère de l’intérieur semblent pourtant démontrer que les chiffres de cette expérimentation seraient
particulièrement défavorable en terme d’accidentologie, malgré une réfection de la chaussée, de la signalisation.
(5) Depuis quelques années, nos politiques, ou plutôt vous, politiques, semblez avoir bien intégré que la répression routière est l'un des rares domaines où les décisions ont un impact immédiat et sensible sur notre quotidien.
Peu importe d’ailleurs leur efficacité et résultats, l'important c'est de prendre des mesures "fortes" qui démontrent le volontarisme politique, ce que démontre d’ailleurs bien l’attitude de monsieur le 1er ministre, soulevant un objectif il est vrai incontestable : sauver des vies.
Malheureusement, le constat est simple, la mortalité sur les routes ne baisse plus depuis que la Sécurité routière ne se base principalement plus que sur la répression et la baisse des vitesses, alors que
l’alcoolémie est impliquée dans un accident mortel sur trois, l’usage de stupéfiants dans 23% des cas, sans parler du téléphone portable, de la somnolence au volant…Non, on oriente tout sur la vitesse, poussé par le lobbying de quelques associations qui n’ont souvent pour seule compétence en la matière que le chagrin de leurs dirigeants d’avoir un jour perdu un proche sur la route,
oubliant le rôle primordial des progrès technologiques sur la baisse de la mortalité : ces progrès technologiques, accompagnés d'une prise de conscience des automobilistes, ont pourtant rendu possible la baisse la mortalité sur les routes pendant 40 ans, et ont rendu acceptable la
politique de répression en place actuellement, toujours plus contraignante, mais qui montre désormais
ses limites en l’absence de progrès technologique récent (
depuis la généralisation des airbag et de l’ESP sur les voitures neuves depuis 2014)
ou de mesures alternative à la seule vitesse.
Cet aveuglement de ce qui nous gouvernent, ce sera autant de vies qui seront perdues, autant de vies directement imputables à
l'ego politique de quelques personnes qui ont la prétention de croire, et de faire croire, que leurs décisions ont eu plus d'impact que 40 ans de recherche et de travaux de milliers de professionnels impliqués dans la sécurité routière.
Il y a
bien plus à faire en matière de sécurité routière que de baisser les limitations de vitesse, que ce soit vis-à-vis de lutte contre l’alcoolémie, la conduite sous stupéfiants, l’usage du téléphone au volant, ou simplement le respect des priorités, des distances de sécurité, l’usage des clignotants, la formation et la sensibilisation des conducteurs (par exemple à l’école, puisque nous sommes ou seront tous un jour des usagers de la route),… malheureusement, les mesures du dernier CISR en ce sens sont bien pauvres !
Cordialement.
M. Relworp X., un automobiliste, motard, cycliste, piéton, bref, un multi-usager de la route en colère, et un électeur-citoyen qui ne l’est pas moins.
1. Quelques sondages d’opinion en défaveur de cette mesure :
89% contre ici : https://france3-regions.francetvinfo.fr ... 96949.html
80% contre ici : http://www.macommune.info/article/sonda ... les-173609
89% contre ici : https://www.capital.fr/polemik/pour-ou- ... es-1259518
77% contre ici : http://www.lefigaro.fr/actualite-france ... -de-90.php
63 à 74% contre ici : http://www.lepoint.fr/automobile/securi ... 87_657.php2. L’étude de Nilsson et Elvik, inapplicable aujourd’hui :
https://www.challenges.fr/automobile/do ... ure_558945 3. Le Danemark est repassé à 90km/h sur départementales après avoir testé sans succès le 80km/h, et l’accidentologie n’est pas remontée pour autant :
https://www.challenges.fr/automobile/dossiers/le-danemark-demontre-qu-on-meure-moins-sur-une-route-a-90-km-h-qu-a-80-km-h_5555604. Le bilan du passage de 80 à 70km/h sur le périphérique parisien :
http://www.lemonde.fr/paris/article/201 ... 79311.html5. L’accidentologie en hausse lors de l’expérimentation des 80km/h sur 82km de nationales française :
http://www.radars-auto.com/actualite/securite-routiere/le-bilan-de-l-accidentologie-dans-les-zones-tests-a-80-km-h-13196. Autres sources d’info intéressantes :
- « Non, le jackpot des radars n’est pas affecté à la sécurité routière », comme l’avait déjà anticipé le Sénat ou la Cours des Compte, et contrairement à qu’annonce le gouvernement :
http://realitesroutieres.fr/non-jackpot-pv-nest-affecte-a-securite-conducteurs-3683?- le sénat demande au gouvernement de fournir les résultats de l’expérimentation des 80km/h en France avant de statuer d’une quelconque mesure :
https://theautomobilist.fr/actualite/80 ... ele-172787 - Notre président Emmanuel Macron s’était pourtant prononcé contre ce genre de mesure lors de la campagne présidentielle :
http://www.rtl.fr/actu/politique/quand- ... 7791749548 - un excellent article qui relie l’accidentologie routière à l’appartenance sociale des victimes :
https://www.monde-diplomatique.fr/2016/ ... TETE/56078