La garantie commerciale ne fonctionnera pas s'il s'agit d'un vice caché, effectivement. Par contre, à la différence des garanties commerciales (comme ta garantie conventionnelle de 3 mois), la garantie des vices cachés relève du droit commun, et s'applique donc à toute vente, y compris à celle d'objets d'occasion (jurisprudence constante depuis 1954). S'il s'agit bien d'un vice caché, tu pourras donc te fonder là dessus pour ta réclamation auprès du concess. Le truc, c'est que les professionnels ont très largement tendance à "l'oublier" en cas de souci, malgré l'obligation légale qui incombe à tout vendeur offrant une garantie commerciale de rappeler à l'acquéreur l'existence et les modalités d'exercice de la garantie légale des vices cachés...
D'ailleurs, le recours en garantie fondé sur un vice caché peut viser soit ton concess directement, soit les vendeurs antérieurs en cas de chaîne de cessions, celles-ci remontant jusqu'au constructeur. La seule limite sur ce point, c'est le délai de prescription de l'action, qui se trouve être de 2 ans à compter de la découverte du vice par l'acquéreur final.
[Passage en mode théorie juridique parce que ça peut toujours servir, pour ceux qui s'en foutent passez direct à la fin du post ]Pour ouvrir droit à une action en responsabilité fondée sur la garantie des vices cachés, 3 conditions cumulatives doivent être réunies. Comme d'hab en droit, c'est simple en théorie, plus compliqué en pratique car chacune de ces notions est soumise à interprétation.
Pour résumer grossièrement, les éléments qui permettent de caractériser un vice caché sont les suivants:
- l'existence d'un défaut rendant le bien acquis impropre à son usage habituel;
- l'antériorité du défaut par rapport à la réalisation de la vente;
- le caractère non apparent du défaut au moment de la vente.
En ce qui te concerne:
1. A la base, l'utilité première d'une moto est de te permettre de te déplacer. On attend donc d'elle qu'elle soit en état de circuler. A première vue, cela excluerait donc la possibilité d'un recours fondé sur les vices cachés. Sauf que ! Par une jurisprudence constante depuis une vingtaine d'année, les tribunaux ont posé le principe selon lequel la destination première d'un véhicule ne se limite pas à la possibilité de circuler, mais doit s'entendre plus largement. Le critère retenu de manière générale est désormais la capacité de circulation dans des conditions de sécurité satisfaisantes pour les occupants du véhicule et les autres usagers de la route. La notion de dangerosité du véhicule est donc prise en compte lors de l'appréciation de l'existence du vice caché. Or, vu ce que tu décris (mais là je parle sous ton contrôle et celui de mécanos avertis), le fait que les gaz restent ouverts malgré le relâchement de la poignée d'accélérateur semble à même de constituer un danger.
2. Pour l'antériorité du défaut, il existe comme souvent un problème de preuve. Compliqué d'expliquer qu'un problème technique existait au moment où on a acquis le véhicule, mais qu'on l'a fait quand même... Il existe plusieurs manières de prouver l'antériorité du défaut, dont la principale reste le recours à une expertise technique contradictoire (et là on retrouve par exemple tous les cas où une expertise réalisée suite à un AVP a permis de déceler que le compteur d'une voiture d'occaz avait été trafiqué, ou qu'une déclaration d'accident avait été "omise" lors de la vente).
Je reprendrai ce point un peu plus bas, puisqu'il est intimement lié à celui du caractère non apparent du défaut.
3. Troisième prérequis à une action en garantie fondée sur les vices cachés: l'acquéreur ne devait pas avoir connaissance du vice au moment de la vente (donc typiquement, pour tes pneux, tu peux oublier ce recours
). Les juridictions considèrent qu'un examen minutieux du véhicule objet de la vente ne doit pas permettre de déceler le défaut. Evidemment, ce critère est appliqué de manière plus ou moins sévère par les juges selon que l'acquéreur est profane / consommateur lambda, ou non.
Attention, les vices cachés ne couvrent pas l'usure dite normale, ou le mauvais usage du véhicule par l'acquéreur, ce qui semble logique. Avec une nuance toutefois, et c'est là que ça rejoint le point sur l'antériorité du défaut: il est évident qu'en fonction de la vétusté de la brêle, de son kilométrage, de l'usage spécifique (type piste) qui a pu en être fait au préalable et dont l'acheteur aurait été informé, la qualité de la prestation attendue n'est pas la même, ce qui implique que le degré de gravité exigé pour caractériser le vice caché peut varier. Ainsi, pour une même panne, les juges pourront retenir que la garantie des vices cachés peut être mise en oeuvre, ou pas. Plus spécifiquement, pour les véhicules d'occasion: une panne qui survient au bout de 500 km et 3 semaines après l'achat de la bécane peut être constitutif d'un vice caché, alors qu'il ne l'aurait pas été si rien n'avait été signalé avant plusieurs millers de km et plusieurs mois / années. Même si cela semble relever du bon sens, tu n'en restes pas moins soumis à la subjectivité des personnes qui traitent ton dossier, et c'est là que le bât blesse. C'est justement en ce sens que je te conseillais d'adresser tout de suite des LRAR au concess et à ton assistance juridique, pour que le cas échéant on ne puisse pas te reprocher d'avoir trop attendu.
[Fin de la parenthèse juridique]A mon sens, sous réserve que la panne ne relève pas de la simple usure normale (sauf si cela aurait dû être détecté à l'occasion du CT, mais seule l'identification de la panne permettra de le dire), tu peux donc totalement te baser sur les vices cachés pour tes contacts avec le concess. Avec un bémol quand même: l'action rhédibitoire ou en réduction du prix que t'offre un recours en garantie fondé sur les vices cachés ne peut s'obtenir qu'à l'occasion d'une action en justice. Donc à voir selon le cout des réparations.
Par contre, rien ne t'empêche de mettre tout ça en avant, même si tu n'as pas l'intention d'engager de procédure par la suite. Parfois, faire comprendre à son interlocuteur qu'on connaît ses droits suffit à le motiver
Pour ton assureur en revanche, je suis assez surprise qu'il te parle de garantie de conformité... Ce n'est pas du tout le même champ d'application que la garantie des vices cachés. En gros, pour les véhicules, les vices cachés concernent tous les défauts "évolutifs", ou détextés à l'occasion de l'expertise qui suit un accident. Par contre, la garantie de conformité ne joue qu'en cas de tromperie / erreur sur les qualités substantielles du bien, avec référence aux qualités
spécifiques convenues d'un commun accord entre les parties au moment de la signature du contrat de vente: kilométrage du véhicule, antécédents d'AVP, modèle du véhicule. Or là, je n'ai pas la sensation que ce soit un truc du genre.